Lorsque je suis arrivée sur le sol américain, ma première impression fut à l'opposé de mon imagination.
J'attendais mes amis qui avaient gentiment proposé de venir me chercher. A la descente de l'avion, j'avais emprunté d'étroits escalators et après avoir passé avec une rapidité déconcertante le contrôle de sécurité, j'avais guetté leur arrivée, postée dans une sombre zone d'arrivée souterraine, étriquée, au plafond bas et à l'horizon bouché. Bref, rien n'était comme je l'aurais cru.
J'attendais donc mes amis. J'avais pris la décision de ne pas toucher une cigarette pendant cette semaine new yorkaise. Cette attente était le premier danger capable de faire vaciller ma motivation. Seulement, je n'en avais pas dans mon sac. Cinq minutes s'étaient écoulées et les jeunes femmes qui m'entouraient dans l'avion étaient déjà parties vers leurs chemins respectifs. A ma gauche, s'était installée une française jeune, un peu nunuche, au moins d'apparence. Elle avait tenu avant le décollage une longue conversation téléphonique avec un ex auquel elle semblait fort attachée et à qui elle avait fini par extorquer l'aveu de son amour, même si, avait-elle souligné avec pertinence il l'aimait tout en couchant chaque jour avec une autre. A ma droite, l'archétype de la new yorkaise : une brune trentenaire, classe, robe, bottes, collants. Elle avait visionné tous les films en costume disponibles dans le programme et avait feuilleté avec ostentation son numéro du New Yorker. Mais sa vraie bizarrerie notable avait été de placer son manteau dans un sac poubelle avant de le ranger dans le compartiment à bagages, au dessus de nos têtes. A la sortie du vol, elle avait hélé l'un des célèbres taxis jaunes tandis que notre frenchie un peu vulgaire errait dans le terminal dans l'attente d'une correspondance.
Je n'avais mis que vingt minutes à m'extraire du 767 et à franchir la barrière des formalités d'arrivée. Je n'en revenais pas. Epatant. Non loin de moi, se tenait un monsieur d'une cinquantaine d'années une feuille A4 entre les mains sur laquelle une main appliquée avait tracé au feutre "Benvenuti à Fabio, Luca, Michel". Il n'était pas si proche que cette attention aurait pu le laisser croire puisque lorsque les trois larrons avaient surgi, c'était seulement une poignée de mains qu'ils avaient tous échangée. Enfin, non. Le troisième avait peut-être décidé de réchauffer l'atmosphère rapidement car il avait fini par prendre son comité d'accueil dans ses bras. A côté de lui, une jeune femme avait un ballon délicatement attaché autour de son mince poignet patientait, scrutant l'écran annonçant les arrivées. Je n'osais trop bouger de ma place, je prenais goût à cette observation.
La serveuse du Dunkin Donuts, face à moi, préparait des bagels et cette vision aiguisait mon appétit. Je doutais toutefois de cette sensation car la fatigue fausse toujours mes sensations. Le ballon s'était retourné au gré d'un courant d'air causé par les portes automatiques. "Welcome" scintillait en couleurs et en paillettes sur la surface lisse, rose et dodue. Etait entretemps arrivé un épouvantail à marques : Isabel Marant, Chanel... une doudoune... une quoi ? Une Moncler sans doute ! Elle semblait atendre également mais quoi ? Qui ? En sirotant son black coffee de chez Dunkin Donuts, elle rajusta sa chapka grise,à crête (de coq ?) et sa paire de lunettes de soleil (très utile pour un sous sol d'aéroport). Une silhouette hors de mon champ de vision avait retenu son attention et son iphone dans une main, son gobelet dans l'autre, elle avait filé sur ses échasses.
J'assistais à l'arrivée d'un autre gros porteur et à une seconde vague dense de retrouvailles plus ou moins chaleureuses. L'épouvantail à marques revint, un sac Vuitton (what else ?) à bout de bras. Ma fille au ballon avait disparu sans que je m'en fus aperçue, décevant.
Les zones d'attente et de transit d'un aéroport ou d'une gare sont de fascinants terrains d'observation mais ce jour-là, ce qui m'importa fut l'arrivée de mes amis et l'aventure new yorkaise qui s'ensuivit et que j'évoquerai un peu plus tard ici.
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