Elle est drôle cette expression qui présuppose que lorsqu'un livre vous tombe des mains, il vous ennuie. J'imaginais plutôt qu'un livre allant heurter le sol après avoir glissé de la prise de son lecteur était un ouvrage qui stupéfiait, choquait, étourdissait.
J'aime écluser deux ou trois nouveautés de la Rentrée littéraire. Cette année, par souci d'expertise, je me suis concentrée sur les auteurs français et ai choisi "Nous étions faits pour être heureux" de Véronique Olmi (malgré un début de répugnance pour ce titre qui sonnerait presque comme du Marc Lévy, ohh je suis méchante... disons du Anna Gavalda... contre laquelle je n'ai rien, que j'ai lue et dont je trouve le style très consensuel mais pas désagréable... contrairement à du Lévy... car oui, par curiosité j'en ai lu un aussi, avant de m'en servir pour caler un pied de table... fin de la digression). et "Oh..." (un titre... plus sobre) de Philippe Djian.
Je suis à la moitié du premier et ai fini le second.
J'avais déjà lu Djian, cuvée 2005, "Impuretés", cela s'appelait et j'en gardais un bon souvenir. Quelle marque laisse les romans à leurs lecteurs ?? Parfois, aucune, c'est mauvais signe, parfois d'intenses... "Impuretés" se situe au milieu, il évoque dans mes souvenirs quelque chose d'un peu cru, un style empreint d'oralité, des descriptions organiques. Maintenant que j'ai cherché au fond de ma mémoire, je constate sans mal que "Oh..." possède toujours cette patte marquée.
La chose étant que je suis incapable de dire si j'ai apprécié cet ouvrage. L'écriture est soignée, très. Visuelle aussi. Ce n'est pas pour rien que Djian est l'auteur de "Doggy Bag", première série littéraire écrite à la façon des feuilletons américains.
"Oh..." raconte 30 jours terribles et anodins en même temps dans la vie d'une femme, qui se fait violer par un mystérieux agresseur, perd ses parents (et l'on découvre que son père décima par le passé un club mickey), voit son ex auquel elle est profondément attachée s'éloigner d'elle, trompe sa meilleure amie & associée avec le mari de celle-ci (car la trahison semble bel et bien fonctionner en ce sens), regarde son fils s'enticher d'une profiteuse et galérer. Trente jours exceptionnels donc de par la densité des événements et leur perversité mais que l'héroïne semble vivre en apnée, sans être beaucoup plus affectée par l'une ou par l'autre des perturbations, sans les graduer sur l'échelle de la difficulté. C'est sans doute cette neutralité (dans le traitement et les réactions) qui fait l'intérêt de la chose et qui préserve cette femme de la crise de nerfs ? Il n'y a qu'avec de la distance qu'elle semble comprendre...
Si Philippe Djian se glisse avec talent dans la peau de l'autre sexe, je demeure circonspecte. Je suis comme l'héroïne (toute proportion gardée) : j'ai besoin de distance, je crois, pour apprécier l'ouvrage.
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