Hier soir tard, j'ai vu Pascale Clark dans un talk-show dont elle était l'une des invités.
Il n'y aurait pas eu son nom en toutes lettres sur la couverture du nouveau livre qu'elle était venue promouvoir, je ne l'aurais pas reconnue. Certes, Pascale Clark est avant tout une voix radiophonique puis une voix-off pour des programmes de Canal + mais tout de même. J'avais déjà vu son visage à plusieurs reprises, deci-delà dans les médias.
Elle semblait affaiblie, amaigrie, vieillie et les lobes de ses oreilles me choquèrent, tant ils semblaient disproportionnés par rapport à son faciès émacié. Elle était donc là pour évoquer son dernier roman : Et après, Fred Chichin est mort. Le pitch ? Une femme assiste à la projection d'ouverture du festival de Cannes 2007 : My blueberry Nights, l'histoire d'une fille larguée et de son chemin vers la réparation affective à la sauce Wong Kar Wai, et le lendemain, cette journaliste (?) se fait plaquer à son tour. Le livre va raconter sa reconstruction à elle et en trame de fond l'arrivée de Nicolas Sarkozy au pouvoir.
Le présentateur de l'émission eut l'indélicatesse et la curiosité toute télévisuelle de demander à Pascale Clark s'il y avait une part autobiographique dans cette oeuvre, ce à quoi elle répondit un "peu importe en fait" qui me parut désabusé.
C'est une question qui revient chez moi : jusqu'à quel point se servir de ses expériences de vie pour écrire ? Parfois, j'ai envie de rédiger des notes différentes, j'ai des textes dans mes tiroirs mais ils me sont si personnels que je me refuse à les poster. Le désir de protéger mon intimité et celle des gens que j'implique sans leur accord dans ma modeste prose est plus fort que le besoin de partager avec la poignée de lecteurs de ce blog.
En plus, je ne suis pas de ceux pour qui le tourment est bénéfique à la plume, en ce sens que la tristesse et la mélancolie assèchent la source de mon inspiration. Je ne pourrais pas ici raconter mes coups de coeur, ses intermittences, mes désillusions. Ou alors à demi-mots. Parce que lorsque je relis chronologiquement les textes produits ici en un an et demi, je sais parfaitement dans quel état d'esprit je me trouvais au moment de cliquer sur Enregistrer.
La mine contrite et amaigrie de Pascale Clark est peut-être une réponse concernant le degré autobiographique de son roman. Ou alors pas du tout et je me plante en beauté avec cette interprétation de supermarché. Je n'en sais rien. Cette affaire me rappelle 2004 et Justine Lévy dont on m'avait offert dès sa sortie le fameux Rien de grave. Elle y abordait en détails sa rupture avec son mari, celui-ci l'ayant délaissée au profit d'une croqueuse d'hommes. Celle-la même qui est aujourd'hui la première dame de France.
Je ne vous raconterai jamais ici les soubresauts de mon coeur.
Jusqu'à quel point se servir de ses expériences pour écrire ? Grave question. J'aurais tendance à penser qu'on peut tout raconter n'importe comment mais pas à n'importe qui ou alors qu'on peut tout raconter à tout le monde mais pas n'importe comment.
Rédigé par : leConcombre | 18 mai 2008 à 18:24
et vice versa :p
Rédigé par : popisdead | 18 mai 2008 à 20:36
je ne peux QUE me servir de mon vécu pour écrire... je fais l éponge, après je presse le tout, et souvent, cela sort tellement mélangé que je n'y reconnais plus rien... mais je sais que c'est moi :)
bisous ici et au plaisir de relire ce blog après une longue pause !
Rédigé par : estebadia | 19 mai 2008 à 07:12
...c'est parfois difficile de ne pas ecrire ce qui nous brule les levres (ou les doigts). J'admire cette force.
Je comprends ta pudeur, du moins ta pudeur ici, je suis pareille, enfin je crois.
Bises,
annie
Rédigé par : annieB | 20 mai 2008 à 00:06
Bonsoir,
en te lisant, j'ai envie de te poser la question : est que l'écriture réhydrate ta tristesse et ta mélancolie pour la transformer en des sentiments plus tournés vers le bien-être ?
Concernant les parcours autobiographiques, j'ai entendu récemment d'un spécialistes que c'était la majorité des textes publiés actuellement. Et son discours "intellor" disait à demi mot que ce n'était pas vraiment de la littérature vs les grands auteurs passés dans les Lagarde et Michard, des siècles précédents.
Et aujourd'hui, en t'écrivant, ces propos me font penser à d'autres qui "affirmaient" que dès que l'on parle de nous on est pas dans la création.
A méditer. Je n'ai pas de certitudes mais que des questions sur le processus créatif. Il me semble qu'il faut faire le vide avant de pouvoir laisser arriver la création. Et peut être qu'écrire sur soi, permet de faire le vide et donc de laisser éventuellement la place à un véritable élan créatif.
Bref, encore un sujet de Philo.
Bisous
Néanmoins, côté écrivain autobriogarphe, je ne peux m'empêcher de penser à Annie Ernaux qui me touche tant.
Je ne sais pas.
Rédigé par : Elihanau | 22 mai 2008 à 23:16
Merci pour ce commentaire !!
Cela me fait plaisir de voir que mes posts peuvent être sujets de réflexion ^^ !
Concernant l'ampleur prise par le mouvement "autobiographique" dans la littérature moderne, il est difficile de ne pas la remarquer sans être même, comme moi, ultra-attentive aux sorties littéraires. Ce mouvement remporte du succès pour être aussi populaire... Qu'est-ce que cela peut bien signifier exactement, autre question...
PS : moi aussi je dis oui à Annie Ernaux ;)
Rédigé par : Lzarama | 25 mai 2008 à 21:08
C'est vrai que la première personne a pris une grande importance sur la scène littéraire française mais le phénomène est lié à l'essor de l'autofiction qui se distingue de l'autobiographie par un souci du virtuel que l'on retrouve dans le polymorphisme du blogueur ordinaire. Le numéro de Philosophie Magazine du mois de mai consacrait d'ailleurs un article intéressant au sujet.
La BNF propose en ce moment une expo Sophie Calle qui joue sur les mêmes lignes, avec en prime l'interactivité puisqu'il s'agit de livrer un morceau de soi aux autres qui ont pour charge de "l'interpréter". Je n'ai pas encore été voir, mais je suis assez tenté.
Rédigé par : Zibaldone | 05 juin 2008 à 00:30
[c’est top] Pour peu que tu gardes ton piquant aigre-doux et ce ton de rose poivrée que je te découvre, nul te pourra t'en vouloir de ne pas vouloir aller chercher dans tes tiroirs sentimentaux de quoi alimenter ton blog. J'en arrête la lecture là pour aujourd'hui. Il m'en restera un peu pour demain ou après demain ;-)
Rédigé par : Nach | 18 août 2008 à 14:50